Apprendre une chorégraphie de danse

Merci, Lucie, pour ta question qui revient souvent. D’ailleurs, après avoir écrit “ Une mémoire infaillible ”, nous avons même sorti une édition collector avec d’autres exercices et exemples dont “apprendre une chorégraphie”.

Apprendre une chorégraphie me parle car j’ai dû apprendre à danser le Rock et la Salsa en école d’ingénieur.

Il est vrai qu’au début cela m’a semblé très compliqué. Il y avait tellement de mouvements que j’étais obligé de regarder le professeur ou les autres élèves pour savoir quoi faire. Mais après avoir appris plusieurs chorégraphies, je me suis mis à mémoriser les suivantes avec une étrange facilité…

En effet, notre mémoire est associative. Comme pour les langues étrangères, plus vous en maîtrisez, plus les nouvelles sont faciles à apprendre. Pourquoi ? Tout simplement parce que votre cerveau va créer des connexions avec celles que vous connaissez déjà.

La danse, c’est la même chose. Lorsque je découvrais mes nouvelles chorégraphies, je retrouvais un bout de la première, puis un autre enchaînement vu ailleurs… Et donc, par association, je construisais inconsciemment celle que je devais apprendre.

Le problème est donc bien de commencer car on n’a rien de connu à quoi se raccrocher.

Avant de vous parler d’une stratégie de mémorisation qui vous servira à apprendre plus facilement et rapidement vos chorégraphies, j’ai besoin de vous apporter un peu de théorie.

Un des modèles les plus admis sur la mémoire se compose en cinq systèmes, impliquant des réseaux neuronaux distincts :

• La mémoire de travail (à court terme) est au cœur du réseau.

• La mémoire sémantique et la mémoire épisodique sont deux systèmes de représentation consciente à long terme.

• La mémoire procédurale permet des automatismes inconscients.

• La mémoire perceptive est liée aux différentes modalités sensorielles.

Dans le cas de la Salsa, c’est la mémoire procédurale (la mémoire des automatismes) que nous souhaitons utiliser. Elle permet de conduire, de danser, de faire du vélo ou jouer de la musique sans avoir à tout réapprendre à chaque fois. Cette mémoire est particulièrement sollicitée chez les sportifs pour acquérir des procédures parfaites et atteindre l’excellence. Ces processus sont effectués de façon implicite, c’est-à-dire inconsciente : la personne ne peut pas vraiment expliquer comment elle procède, pourquoi elle tient en équilibre sur son vélo. Les circuits neuronaux sont automatisés.

Notre objectif lorsqu’on veut maîtriser une chorégraphie, c’est donc de la faire rentrer dans notre mémoire implicite procédurale et nous savons que le meilleur moyen pour y arriver, c’est la répétition régulière (dans l’idéal, quotidienne).
Avec de la pratique, un danseur de salsa exécutera la passe “Choufla double” sans réfléchir ! 

La stratégie que je vous propose ici, pour maîtriser votre chorégraphie, c’est d’utiliser tout du moins au début, votre mémoire épisodique afin de faciliter vos répétitions.

Dans l’ordre, il vous faudra :

• Comprendre votre chorégraphie : vous allez la réaliser plusieurs fois avec votre professeur pour vérifier que vous comprenez bien toutes les étapes, que vous n’avez pas de problème technique voire physique. Auquel cas vous aurez besoin d’y remédier.
• Grâce à la compréhension, nous sommes généralement capables d’enchaîner des étapes avec une liste d’indices plus ou moins longue. Dans mon cas, j’enchaînais certaines étapes, puis plus rien … on me donnait un indice (le mouvement d’après) et, hop ! j’enchaînais de nouveaux 2-3 mouvements, puis blanc… on me redonne un indice … etc. Avec cet enchaînement d’indices, j’étais donc capable de réaliser ma chorégraphie. L’objectif de cette deuxième étape est donc de lister les indices dont vous avez besoin sur un papier. ✍
• Une fois cette liste en main, il s’agit alors de trouver des associations qui vous rappellent ces indices. Par exemple : vous bloquez avec le bras droit en l’air, le mouvement d’après est d’avancer le pied droit. Imaginez-vous en train de cueillir une pomme (bras droit en l’air) puis comme un footballeur de taper dans un ballon (avancer pied droit) qui serait en fait, une pomme.
• Une fois la liste d’indices à trous de mémoire transformée en mini histoire  : place à l’entraînement ! La répétition régulière sera la clé pour ancrer cette nouvelle connaissance dans votre mémoire du corps. Vous pouvez réaliser cette consolidation soit de manière physique soit en la visualisant. La visualisation fonctionne aussi bien que l’exercice physique.
• A chaque trou de mémoire, gardez votre position, retrouvez vos histoires puis votre indice puis poursuivez la chorégraphie. Au fil des répétitions, vous allez de moins en moins solliciter vos histoires. Ce sera le signe que vos acquisitions sont en train de s’installer dans votre mémoire procédurale.

Et bientôt, vous danserez la salsa comme vous faites du vélo : sans y penser !